Cas cliniques - Plancher buccal - Cas 3 - Homme de 51 ans

 

Motif de consultation

Homme de 51 ans consulte pour une irrégularité du plancher buccal, présente depuis environ 6 mois, après dit-il “s’être brûlé avec du thé”.

 

Histoire de la maladie

Après une vive douleur au moment de la brûlure il y a 6 mois, la lésion est devenue indolore mais une gêne fonctionnelle persiste, commençant à inquiéter le patient.

 

Interrogatoire

Patient sous Kardégic* depuis 2004 à la suite d’un AVC, et patient fumeur (31 paquets/année).

 

Examen clinique

Lésion de surface irrégulière, bourgeonnante, granuleuse du plancher buccal gauche, englobant la crête sublinguale, mesurant 3,5 cm de grand axe.

La couleur est d’un rouge plus accentué que la muqueuse adjacente et légèrement plus rosâtre en son centre discrètement kératosique.

La palpation met en évidence une induration péri-lésionnelle du plancher.

Un ganglion sous mandibulaire homolatéral est mis en évidence durant la palpation des chaînes cervicales.

 

Diagnostic différentiel

Carcinome épidermoïde, lithiase submandibulaire (dure et bien limitée à la palpation), lésion traumatique (ne persiste pas 6 mois), verrue/ papillome, leucoplasie verruqueuse.

 

Hypothèse diagnostique (clinique)

On évoque un carcinome épidermoïde du plancher du fait de la persistance de la lésion depuis plus de 6 mois, de l’aspect bourgeonnant, de l’induration à la palpation et du passif tabagique du patient (31 PA). De plus, il existe une adénopathie suspecte.

 

Attitude thérapeutique

– biopsie-partielle sous anesthésie locale (biopsie diagnostique)

– analyse anatomopathologique en urgence

 

    

 

Examen anatomopathologique / Histologie

Le prélèvement montre une prolifération tumorale développée au dépend de la muqueuse (1) qui est constitué d’une prolifération de kératinocytes (2) présentant des atypies cytonucléaires marquées (3). On retrouve des figures mitotiques atypiques (4) surtout en profondeur. La lésion infiltre la partie superficielle du chorion.

    

 

Diagnostic définitif histologique

Confirme notre hypothèse de carcinome épidermoïde invasif.

 

Le carcinome épidermoïde des voies aéro-digestives supérieures est une tumeur maligne, associée à une prolifération incontrôlée de cellules épithéliales. Il se situe à la sixième place des cancers les plus fréquents au monde, et représente environ 90% des cancers oraux.

Il peut siéger en tout point de la muqueuse orale, seulement certains sites représentent une localisation favorite (ordre décroissant : langue, plancher buccal, gencives, commissure inter-maxillaire, trigone rétro-molaire, muqueuse jugale, vestibules, palais, lèvres).

On lui reconnaît un important polymorphisme clinique, avec 3 formes fréquentes : la forme ulcéro-bourgeonnante, ulcéreuse et végétante.

Les principales caractéristiques à rechercher à l’examen clinique face à une lésion suspecte, sont :

  • induration lésionnelle (élément majeur) et péri-lésionnelle ;
  • douleur : longtemps asymptomatique, puis progressivement de plus en plus douloureux ;
  • absence de cicatrisation d’une lésion (typiquement une ulcération traumatique qui perdure) ;
  • saignement spontané ou au moindre contact ;
  • fixité de la langue ;
  • dysphagie ;
  • sensation de corps étranger ;
  • présence d’adénopathie ;
  • altération de l’état général.

Par principe, toute lésion qui persiste au delà de 3 semaines après traitement doit être biopsie. La précocité du diagnostic est en faveur d’un meilleur pronostic.